Vivre c’est habiter : trois ans après
En 2003, Architectures à vivre érigeait
dans le parc de La Villette deux maisons
destinées à la visite. Exposées pendant
plus d’un an, elles ont accueilli près de
50 000 visiteurs pour être finalement
vendues aux enchères le 20 juin 2004.
Si la maison bois a subi un destin
funeste, la seconde, toute de métal, a
finalement repris vie en Normandie.
Vendue aux enchères pour un montant de 60 000 euros, la maison bois des architectes Aldric Beckman et Françoise N’Thépée n’a pas eu droit à l’avenir prometteur de sa voisine en métal, adjugée quant à elle à 58 000 euros. Procès après procès, son nouvel acquéreur n’est pas venu chercher son bien. Restée sur place, elle a finalement été détruite début 2007, par l'établissement du Parc de la Villette.
Déménagement
La condition au moment de la vente aux
enchères était pour chaque acquéreur la
prise en charge des frais de démontage et
remontage. Tacitement, il fallait disposer d’un
endroit où stocker sa maison et trouver des
entreprises pour mener à bien cette aventure
peu ordinaire. Plutôt que la voir partir au
rebut, l’amateur d’art qui a fait l’acquisition
de la maison métal lors de la vente préfère,
au moment où il faut engager le démontage,
la céder pour un euro symbolique à un ami
architecte d’intérieur. L’idée séduit le nouveau
propriétaire qui se trouve en « hériter ». Reste à trouver un terrain où poser cette oeuvre
insolite en passe de devenir sa résidence
secondaire.
« Cette maison était construite sans permis de
construire dans le Parc de la Villette de Paris. Elle
devait être démontée dans un délai très rapide
après la fin de l’exposition. Il a fallu trouver
des entreprises spécialisées pour démonter la
structure afin de répertorier chaque pièce. Elle
fut stockée pendant une année dans une ferme,
chez un ami, le temps de trouver le terrain et de
déposer un permis de construire », raconte le
propriétaire.
Bord de mer et boulons neufs
Grâce à l’ouverture d’esprit de la mairie d’Agon-Coutainville dans la Manche, la maison est aujourd’hui implantée au beau milieu d’un site de 2 000 mètres carrés d’anciennes dunes, à 800 mètres de la mer. « Trouver un terrain pour une maison qui existe déjà n’a pas été très simple », explique le propriétaire. L’autre difficulté a été de trouver un endroit assez grand car la maison ne peut être ni mitoyenne, ni positionnée en vis-à-vis direct, en raison de ses ouvertures sur chaque côté. Pourtant pareille à elle-même, elle s’est accommodée de quelques ajouts, pour reposer dorénavant sur un soubassement accueillant deux chambres d’amis, une salle de bains et un garage. L’étage a été modifié pour réaliser deux chambres indépendantes. Risques de corrosion obligent, l’ensemble de la structure et de l’habillage a reçu une protection. Enfin, les éléments n’ayant pas supporté le démontage tels l’ensemble des boulons et les pièces d’étanchéité ont été changés.
Chantier hors norme
Redonner forme à la maison a entraîné un
chantier étonnant. Compte tenu que les murs
du soubassement n’avaient pas de plancher,
la structure a été montée juste à côté sur une
plate-forme, pour être ensuite posée sur ce
nouveau niveau. « Le remontage de la maison
a fait beaucoup de bruit dans le village, se
souvient le propriétaire. Les commentaires
allaient bon train, notamment quand il a fallu
faire appel à une grue pour soulever et déplacer
la structure métallique. »
Le destin de la maison métal s’est poursuivi
sans les architectes. Pas de seconde
mission pour Hamonic et Masson, mais une
seconde vie pour la maison métal dont ils se
réjouissent. Ravis de voir que les forces du
projet de départ – préfabrication, démontage
et remontage possibles, évolutivité – aient
surmonté l’épreuve du doute. Pour Gaëlle
Hamonic, la maison métal et son procédé
Styltech restent un « bon modèle de
préfabrication ».
Pour son nouveau propriétaire, même si le
démontage et remontage sont possibles,
cela s’avère au final pas vraiment rentable,
leur coût étant équivalent à celui d’une
construction neuve. Une ombre qui pour lui
ne gâche pas le tableau : « Comme beaucoup
de personnes, j’avais visité cette maison à
La Villette et avais été séduit par les espaces
à vivre créés dans cette maison exemplaire.
Habiter dedans aujourd’hui est un privilège et
un plaisir qui se renouvelle à chaque séjour. »